Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Blinking Lights (and other revelations)
2 avril 2006

ABBEY ROAD

 

138039904711

 

Retrouvons les aventures de nos 4 amis pour l’avant dernier épisode de leur discographie officielle. Rappelons  où nous en étions, avant la digression assez inutile du Yellow Submarine : les Beatles, partis se ressourcer en Inde après l’enregistrement fatiguant du Sgt Pepper étaient revenu avec une multitude de compositions mais en ordre dispersé. Malgré des dissensions de plus en plus importantes et des séances d’enregistrements de moins en moins communes, l’éclectique et copieux White Album est une grande réussite. Les Beatles se retrouvent alors en studio pour lui donner un successeur, que Paul McCartney souhaiterai enregistré live et sans trop de production comme à leurs débuts (d’où le nom de ce projet, qui devait en plus faire l’objet d’un film : Get Back). Mais les problèmes rencontrés précédemment ressurgissent, en pire : Paul veut tout contrôler, John s’intéresse plus à Yoko qu’à l’enregistrement, Georges est frustré de ne pas pouvoir placer ses compositions, Ringo est perdu au milieu. Après deux mois d’enregistrement où les egos s’entrechoquent et la motivation s’affaisse, Get Back n’accouche que d’un single malgré l’impressionnante quantité de matériel enregistré. Sentant la fin du groupe approcher les Beatles décident de revenir à un enregistrement plus traditionnel et de faire les efforts nécessaires afin de sortir un ultime disque : Abbey Road.

 

Abbey Road est l’album qui m’a donné le plus de fil à retordre, d’autant plus que je ne l’avais jamais écouté avant cette année. Il fourmille d’idées, mais qui partent dans tout les sens et sont de qualité très variables (c’est sans doute le disque où il y a le plus grand écart de qualité entre les meilleurs et les moins bons titres). En ce sens, je l’ai trouvé beaucoup moins homogène que le Double Blanc malgré une production superbe qui donne une couleur unique à l’album.

A l’instar de « Back in the U.S.S.R », les Beatles ont l’entame parfaite avec « Come Together », un titre dont les couplets tout en tensions (guitares étouffées, glissandos de basse, roulements de toms) explosent en un court refrain libérateur. La fin de la Face A est aussi idéale, avec l’un des meilleurs titres des Beatles, l’épique « I Want You (she’s so Heavy) » s’étirant sur plus de 7 minutes. Il est à la fois construit sur une opposition de style entre les couplets  bluesy (guitares solo larmoyantes, accords de claviers) et les refrains appuyés (arpèges lourds de guitare, solos de claviers aliénés), et sur une cohérence d’ambiance dramatique, avec une basse extraordinaire et ce chant répétitif exprimant au mieux la frustration. Etirant la conclusion de manière extrêmement novatrice, les Beatles font de « I Want You (she’s so Heavy) » un modèle de modernité ayant à coup sur inspiré de multiples groupes, au premier rang desquels on retrouve le Alice Cooper Band (qui a aussi bien écouté « the End »).

Entre ces deux must tendus à l’extrême (composés par John Lennon, notons le), les autres membres du groupe ont chacun placé un morceau plus ou moins intéressant. Georges Harrison  propose une jolie chanson, « Something », qui sera son unique single pour les Beatles. Un peu trop romantique à mon gout, le titre est ici mal servi par les arrangements qui fonctionnent si bien ailleurs, et souffre d’un trop grand décalage d’ambiance avec le « Come Together » qui lui précède. Alors, on pourrait bien sur faire le même genre de remarques avec le deuxième titre qu’Harrison place sur Abbey Road. Mais  je trouve au contraire que « Here Comes the Sun », non content d’être une chanson fabuleuse (de loin la meilleure de son compositeur), succède à merveille à la fin brutale  voulue par Lennon sur « I Want You (she’s so Heavy) ». C’est un hasard complet, à l’origine les deux chansons ne sont pas liées puisqu’elles sont sur deux faces différentes. Mais cet enchainement renforce le propos d’« Here Comes the Sun », par ailleurs très bien rendu par la légèreté de la musique, d’une coupure ensoleillé dans l’enregistrement du White Album vécu comme très lourd et frustrant par Georges.

Ringo Starr met lui aussi sa meilleure chanson (rires…) sur Abbey Road. « Octopus’s Garden » est une sympathique comptine dans la veine d’ « Obla di Obla da », qui doit beaucoup au groove de la basse de McCartney. Plaisant, mais là encore trop loin de l’ambiance et du niveau des deux chansons phares qui encadrent cette Face du disque.  Quant à Paul, il échoue avec « Oh ! Darling » là où son principal concurrent et néanmoins ami avait réussi : son blues a beau être magnifié par un chant puissant et un jeu de batterie renversant, il reste encore trop classique pour vraiment sortir du lot. Mc Cartney signe aussi avec « Maxwell’s Siver Hammer » tout simplement la pire composition figurant sur un disque des Beatles (si mauvaise que Lennon a refusé d’y participer…). On le voit, la première partie d’Abbey Road a réservé à l’auditeur le meilleur comme le pire. La seconde est encore plus difficile à appréhender…

 

Après un premier morceau de toute beauté qu’on a déjà évoqué, la Face B se poursuit avec « Because », une chanson triste basée sur une lente mélodie de claviers aux sonorités étranges et des harmonies vocales exceptionnelles. Un titre qui m’a beaucoup fait penser à certains morceaux récents de Radiohead, ce qui figure bien sa modernité. Vient alors ce qui est souvent présenté comme le sommet du disque et à ce titre l’un des passages de la discographie des Beatles que j’étais le plus impatient de découvrir lors de ce Challenge : le Medley. Présenté comme un assemblage d’éléments de chansons enregistrées précédemment (notamment lors du projet Get Back), la fin d’Abbey Road m’a en fait pas mal déçu, et m’a conforté dans l’idée que, contrairement à beaucoup de fan, je ne considère pas cet album comme faisant partie des tout meilleurs des Beatles. Tout d’abord, l’intitulé Medley est assez mensonger, dans la mesure où les huit morceaux qui le composent ne s’enchainent pas tous. Il y a au moins trois parties indiscutablement distinctes, et j’irai même jusqu’à cinq pour ma part. Deuxièmement, il y a un monde entre une idée (un riff, un couplet), et une chanson: des idées, même des bonnes, tout le monde en a, mais le plus dur est d’en tirer une bonne chanson complète, et c’est là toute la différence entre le compositeur talentueux et le gratouilleur du dimanche. En ce sens, je trouve le procédé du medley un peu facile, et venant des Beatles, assez décevant : ca sent quand même la fin….

La meilleure illustration en est le cœur du medley, ou ce que j’appellerai le vrai medley, composé de « Sun King », « Mean Mr Mustard », « Polythene Pam » et « She Came in through the Bathroom Window ». Si l’on met de coté le premier, pas idéalement enchainé et surtout assez anecdotique (on dirait du mauvais Air), les trois autres parties sont intéressantes, mais pas assez développées pour être vraiment marquantes. J’aime bien le tempo soutenu de « Polythene Pam », ainsi que le son inhabituellement crado sur les guitares. En un sens on regrette que les Beatles n’en ai pas fait une chanson complète, on peut aussi se dire qu’elle y aurait perdu son coté spontané et rock, qui en fait tout le charme. L’enchainement avec « She Came in through the Bathroom Window » est le meilleur du medley. Ce passage a de beaux soli de guitares et deux ambiances assez distinctes sur le couplet et le refrain : c’est une bonne composition qui pâti un peu  d’être noyée dans cette succession d’extraits.

Autre exemple de la complexité d’Abbey Road, « You Never Give me your Money », premier titre du medley, mais qui n’y est artificiellement incluse que parce que la dernière partie (« Carry that Weight  »)  y ajoute un couplet en guise de rappel (un procédé très bien trouvé et amené, d’ailleurs). « You Never Give me your Money » est en fait un titre indépendant (il dure 4 mn), mais qui pourrait presque être considéré comme un medley à lui tout seul. L’entame est assez mièvre, une ballade au piano dont Paul s’est fait le spécialiste, en général pas pour le meilleur. Puis, après une minute, le titre mute en piano bar rythmé, avant de rapidement tourner en rock psychédélique puis en rock bluesy à la Led Zep, le tout sur fonds de terribles riffs de guitare. Balloté d’une ambiance à l’autre dans des parties enchainées rapidement, je ne sais au final toujours pas si j’aime ce morceau ou pas, il est en tout cas assez fascinant : c’est un peu le sentiment général que j’éprouve pour l’album.

Autre titre fascinant, « Golden Slumbers », qui introduit la 3eme et dernière partie distincte du medley. C’est lui aussi une balade de Mc Cartney, avec arrangements de cordes lyriques et chant mielleux tellement forcés qu’on est forcément dans une caricature volontaire. En tout cas on est tout ouïe, d’autant que la transition avec « Carry that Weight » est magnifique. Ce morceau est lui-même une fois de plus déstabilisant, avec un refrain à chanter en chœur et un couplet reprenant habilement la mélodie de  « You Never Give me your Money ». La transition vers « the End » est assez maladroite, mais ce titre presque glam rock est très riche, avec ses différents solos où chacun à tour de rôle (même Ringo Starr !) est mis en avant, ses belles parties de guitares et sa fin légèrement pompeuse mais si parfaitement symbolique. Autre symbole que ce dernier titre intitulé « the End », la fin abrupte de « I Want You (She’s so Heavy)», ultimes minutes enregistrées par les quatre Beatles ensemble. C’en est donc fini du plus grand groupe de rock de tout les temps. Mais pas de ce Challenge, car il reste un disque : apparemment les producteurs se sont arrangés pour se faire encore un peu de pognon sur la bête…

(L’air de rien, en 23 secondes, les Beatles inventent (par hasard) un dernier truc, le morceau caché. Ils sont vraiment trop forts….)

 

Qualifiés d’Office : « Come Together », « I Want You (She’s so Heavy)», « Here Comes the Sun », « Because ».

 

Session de rattrapage : « Octopus’s Garden », « You Never Give me your Money », « Polythene Pam / She Came in through the Bathroom Window », « the End ».

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité
Derniers commentaires
Publicité