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Blinking Lights (and other revelations)
2 avril 2006

LET IT BE

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Le Beatles Beginner’s Challenge touche à sa fin, et pour être franc le terme Beginner n’est plus très exact, puisque depuis deux ans j’ai acquis pas mal de connaissances sur les Fab Four (1). Concernant Let it Be, c’est plutôt heureux car l’album n’a véritablement d’intérêt, et ne peut être bien appréhendé, que placé dans le contexte de sa création et de sa sortie. Let it Be est un album posthume, publié  après la séparation officielle des Beatles, mais il a été enregistré avant Abbey Road. Il ne doit d’ailleurs son existence qu’à leur nouveau manager Allen Klein, et non au groupe lui-même qui considérait les enregistrements effectués comme bons à jeter. Tout partait pourtant d’une bonne idée de Paul Mc Cartney : pour ressouder le groupe après les sessions du White Album, dont quasiment aucun des  titres n’avait été enregistré par les Beatles au complet, il suggéra de réaliser un disque à l’ancienne, en prise directe et sans arrangements rajoutés. Le groupe devait en plus profiter de ce retour aux sources (d’où le nom du projet, Get back) pour se débarrasser d’une obligation contractuelle en laissant des caméras filmer les sessions d’enregistrement et un concert destiné à être diffusé en direct à la télévision.

 

Mais confrontés à des problèmes techniques, à des dissensions internes musicales et personnelles catastrophiques, ainsi qu’à des points de vue divergents sur le but à atteindre (peut être à cause de l’absence de leur Producteur historique George Martin), les Beatles n’arrivent pas à concrétiser l’idée de départ et passent le temps en improvisant ou en commençant des chansons sans les finaliser (on retrouvera quelques unes de ces tentatives dans le medley du Abbey Road). La tension s’accumulant, les Beatles sentent la fin venir (Harrison a d’ailleurs momentanément abandonné le groupe) ; voulant terminer sur une note à la hauteur de leur renommée, ils décident de faire machine arrière et d’enregistrer un ultime disque à la manière de leurs derniers succès. Pour clôturer le projet Get Back, ils donnent quand même le concert filmé prévu, sur le toit du studio qu’ils ont fait construire. Ils y interprètent les chansons les plus abouties des dernières sessions, puis se lancent dans l’enregistrement d’Abbey Road, se désintéressant complètement des 29 heures de bandes gravées les semaines précédentes.

 

On plaint Glyn Johns, le pauvre producteur choisi à l’époque pour faire le tri et sortir un disque à partir de ces enregistrements. Si a priori Let it Be en compile le meilleur, les 28 autres heures doivent être sacrément barbantes tant il y a déjà de choses dispensables sur le disque (2). Beaucoup de titres, fort sympathiques au demeurant, sonnent comme un terrible retour en arrière lorsqu’on connait Abbey Road (l’exemple qui saute aux oreilles est « One After 909 », un rock n roll à l’ancienne dont j’apprendrai sans surprise qu’il est en fait l’une des plus vieilles compositions de Lennon et McCartney, ressortie des cartons pour Get Back) . Cela dit, c’était justement l’objectif affiché du disque ! On comprend alors que respecter l’idée initiale tout en sortant un album digne des dernières productions des Fab Four se soit révélé une équation impossible à résoudre : Glyn Johns n’arrivera à rien de satisfaisant et il faudra attendre qu’Allen Klein recrute Phil Spector après la séparation des Beatles pour que Let it Be sorte enfin : il faut dire que le célèbre producteur s’étant passé de l’accord du groupe, il avait la tache plus facile, d’autant qu’il ignora complètement le concept de base en intégrant de nombreuses retouches et des arrangements d’orchestre aux chansons. Son travail fut diversement apprécié, Mc Cartney beuglant qu’il avait trahit la volonté des Beatles et bousillé certains titres avec ses arrangements, Lennon estimant à l’inverse qu’il avait réussi l’impossible en sortant quelque chose d’acceptable à partir des enregistrements d’origine. Un truc sympa c’est qu’on peut se faire sa propre idée aujourd’hui, puisque Paul Mc Cartney a ressorti 30 ans plus tard le disque avec ses propres arrangements sous le nom de Let it Be… Naked.

 

La première constatation (logique), c’est que les arrangements ne changent pas fondamentalement la qualité intrinsèque des chansons. « the Long and Winding Road », cette horrible balade sirupeuse, l’est à peine moins amputée des violonades dégoulinantes rajoutées par Spector. Avec un peu de mauvais esprit, on pourrait d’ailleurs dire que le premier à avoir trahit l’idée initiale de Get Back, c’est celui qui proposa ce morceau pour le disque, à savoir Paul lui-même. Idem pour le standard « Let it Be » qui, aussi beau soit il, n’est pas vraiment le genre de titres que les Beatles interprétaient ensemble dans les caves de Hambourg à leurs débuts. Georges Harrison a bien mieux respecté le principe avec ses deux compositions, et, sans être exceptionnel, son petit blues « For you Blue », mis en valeur par le piano de Billy Preston, est assez plaisant. Heureusement McCartney a aussi proposé « Get Back », un single hyper efficace quel que soit la version du disque. Nul doute que si toutes les compos avaient été de cet acabit, le disque aurait été un chef d’œuvre, Spector ou pas Spector. Autre réussite, le terrible « I’ve got a Feeling » de John Lennon, qui évoque énormément les Who. Ces morceaux sont en fait les deux seuls à être à la fois conforme au projet Get Back et à sonner comme des compositions modernes des Beatles.

 

Finalement, Paul McCartney n’est pas irréprochable quant à son respect du projet Get Back, d’abord comme on l’a vu au niveau de la composition, mais aussi lors des arrangements de son Let it be… Naked puisqu’il y vire tout les dialogues déjantés et bribes d’enregistrement de la version initiale qui donnaient justement un coté brut et improvisé au disque. Ses cris d’horreur (associés à ceux de Geoff Emerick et Georges Martin) sont donc très largement exagérés, la plupart des titres étant sensiblement les même sur les deux versions de Let it Be, et les arrangements de Spector, quand ils sont apparents, étant loin d’en gâcher les bons titres: « Across the Universe » est une très belle balade sur l’un ou l’autre disque. Malgré tout, je trouve sa version, sonnant bien plus propre et studio, un cran au dessus.  Sa déSpectorisation (j’adore le terme) a été bénéfique, avant tout par l’unité nouvelle qu’elle confère à l’album. Et puis il y a cet indispensable réagencement des titres, dont l’ordre initial incompréhensible participait énormément au coté bordélique et dispersé de Let it Be (3). Enfin l’ajout de « Don’t Let me down » au détriment de « Dig it » et « Maggie Mae » rééquilibre le taux de bonnes chansons, et achève de donner toute sa légitimité à la relecture de Let it Be par McCartney.

 

Ses quelques coups d’éclat n’empêchent pas Let it Be d’être un point final mineur à la discographie des Beatles. Point Final ? Evidemment pas, puisque les Quatre Garçons dans le Vent, aujourd’hui réduits à deux, sortent  régulièrement (et virtuellement bien sur) des nouveaux disques pour des fans toujours aussi nombreux et motivés, ainsi évidemment que pour le portefeuille des ayant droits n’étant pas près de tuer la poule aux œufs d’or. Ce qui laisse éventuellement présager d’autres articles pour cette rubrique (d’autant que les compilations se révèlent indispensables, certains des meilleurs singles des Beatles ne figurant pas sur leurs albums).

  

(1)   cela dit je n’avais jamais écouté ce disque jusqu’à présent, et n’en connaissais que les extraits placés sur la compilation bleue.

 

(2)   il parait qu’un bootleg en 17 volumes reprenant l’ensemble des sessions est disponible. On réservera ca aux fans ultimes….

 

(3)   Commencer par « Get Back » et finir par « Let it be » me semble incontournable…

 

Qualifiés d'office: "Accross the Universe", "Let it Be", "I've got a Feeling", "Get Back", "Don't Let me Down"

Session de rattrapage: "For you Blue"

 

 

Blog de blinkinglights : blinkinglights, LET IT BE

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