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Blinking Lights (and other revelations)
6 juillet 2015

GRAVENHURST - Jeudi 24 Mai 2012 - Epicerie Moderne - FEYZIN

 

Le concert où nous devions jouer annulé à la dernière minute par le Trokson, une petite fille malade depuis une semaine, un temps de merde depuis trop longtemps… rien de catastrophique, mais j’ai comme un poids sur les épaules ces derniers temps. Heureusement, l’Epicerie Moderne est là pour me redonner un peu d’enthousiasme en programmant Gravenhurst, groupe pour lequel j’ai eu un véritable coup de foudre il y a quelques années et que je n’ai jamais eu l’occasion de voir sur scène. Nick Talbot est venu défendre un nouveau disque, the Ghost in Daylight, et l’écoute rapide que j’ai pu lui accorder dans la journée confirme mon impression qu’il fait partie des rares artistes, comme David Eugene Edwards ou Shannon Wright, qui sont absolument incapables d’écrire la moindre chanson médiocre (1). Plus de 6 mois (depuis l’excellent concert de Pinback) que je ne suis pas venu à Feyzin, une période exceptionnellement longue que je suis bien content de briser par cette belle soirée. Il n’y a pas grand monde sur le parking, d’ailleurs le public restera restreint tout au long de la soirée. Gravenhurst semble malheureusement bien confidentiel, Nick Talbot étant du genre à fuir comme la peste tout ce qui ressemble de près ou de loin au Music Business. Il ne me reste plus qu’à patienter un moment à l’aide d’une pinte de bière en explorant la nouvelle et charmante boutique proposant BDs, Vinyles et autres objets collectors pour geeks.

 

00c

 

La première partie Crane Angels, en provenance de Bordeaux, envahit la scène de l’Epicerie. Dix personnes (dont 6 uniquement au chant), des changements d’instrument fréquents et une belle énergie rock, la référence à Arcade Fire est inévitable, même si musicalement un seul des titres soutiendra vraiment la comparaison (celui précédant « Lucio », et le premier du concert à m’accrocher totalement). Le groupe a beau être motivé et carré (aidé en cela par un excellent batteur (2)), la première moitié du concert ne me séduit pas du tout. En cause un manque criant de mélodies et des titres beaucoup trop hachés pour être agréables ou entrainants. La deuxième moitié du concert me plaira plus, avec leur meilleur titre « Lucio » (direct et sans fioritures)  et deux derniers morceaux convaincants (parlant respectivement de sang et de plage) qui exploitent mieux les capacités du groupe. Il est évident qu’il n’en manque pas, le niveau technique étant élevé et le ton dynamique bienvenu, mais Crane Angels gagnerait à simplifier ses compositions et à mieux utiliser les nombreuses et diverses voix à sa disposition.

 

 

00d

 

Le temps d’une bière et Nick Talbot alias Gravenhurst entre sur scène fort bien entouré, puisque c’est une batteuse et une bassiste qui complètent le groupe pour cette tournée. Le visage rond, une grande frange venant mourir sur des lunettes rectangulaire, une attitude timide, on ne peut pas dire que le bonhomme en impose par sa présence. La scène est sobre, il est question pour les musiciens de chemises sombres, de robe sage, de petites lunettes et de coiffures bien propres, pas le moindre piercing ou tatouage à l’horizon : l’ambiance est austère, voire janséniste. C’est une autre lumière qui viendra nous cueillir dès les premières notes de « I Turn my Face to the Forest Floor », celle de la pureté des compositions de Gravenhurst, d’autant que ses copines viennent chacune agrémenter de leur superbe voix les arpèges de l’anglais. Les arpèges, voilà sans doute une raison de mon attachement au groupe, une autre étant sa capacité à parsemer ses disques de coups de sangs rageurs venant casser une délicatesse qui, omniprésente, m’eut probablement irritée. Ce soir, nous aurons beaucoup d’arpèges (un seul morceau en accords, « the Prize ») et trop peu de saturation, d’où un sentiment mitigé que je retrouve dans la plupart des review de cette tournée trouvées sur internet.

 

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Pour le moment, je savoure l’enchainement d’un des plus joli titres folk de Gravenhurst, « Nicole », et du plus marquant morceau du dernier disque, « the Ghost of Saint Paul », où les trois voix mêlées font merveille. Les premiers coups de grosse caisse retentissent pour « Saints », excellente introduction de l’album the Western Lands dont la retranscription sur scène m’enchante. Fasciné jusqu’à présent par les titres mélodiques judicieusement extraits de l’ensemble de la discographie de Gravenhurst, je commence à partir de cet instant à attendre le coté plus bruitiste du groupe, s’exprimant particulièrement sur l’album Fires in Distant Buidings. Las, c’est justement là que les demoiselles s’éclipsent, ce qui est assez incompréhensible puisque vient le moment de « the Prize », l’un des rares passages violent de the Ghost in Daylight. Résultat, le passage saturé lancé par le seul Nick Talbot sonne assez artificiel et tombe plutôt à plat. C’est finalement sur le dernier morceau, « Black Holes in the Sand », que le groupe se lâchera enfin avec force larsens, gros toms, cymbales, et l’unique utilisation de boucles de guitare de la soirée. Je suis évidemment ravi par ce terrible moment, mais cela alimente aussi ma frustration : ainsi donc, ils en étaient capables, pourquoi n’avoir donné dans le noisy qu’à cette occasion ?

 

 

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D’un coté la musique était magnifique, et les deux titres de rappel interprétés en solo, d’une beauté incroyable, en rajouterons une couche. De l’autre, la sagesse d’un set sans autre fantaisie que les mots gênés de Nick Talbot lors de ses longues séances d’accordage entre chaque titre, la sous exploitation de la batteuse et la bassiste-claviériste sur un tiers des morceaux (et leur absence sur un autre tiers) ainsi que la durée minimale du concert (75 mn environ) font que je repars un peu déçu de cette soirée dont j’attendais plus. Gravenhurst se sera révélé moins enthousiasmant sur scène que sur disque, et j’aurais été surpris de m’apercevoir progressivement que ce concert fut probablement l’un des moins fondamentalement rock auquel  j’ai assisté (une impression dont j’aurai une étonnante confirmation par la suite) (3).

 

Gravenhurst-Live-04

 

Nick Talbot restera donc un être entouré d’un mystère qui me bloquera lorsque je le croiserai brièvement, ne pouvant lui poser que l’unique (traditionnelle et ridicule) question « could you sign my disc ? » (4). Je n’aurai pas attendu en vain puisque avec les disques achetés me fut donné un curieux poster figurant la pochette de the Ghost of Daylights au recto, et des écrits et bandes dessinées de Nick Talbot, le tout assez violent et cynique. Parmi eux, illustré par un schéma drôle et cinglant sur la professionnalisation d’un groupe de rock, un texte intitulé Why i hate Rock n Roll dont voici un extrait : « jaded promoters, parasitical booking agents, decaying P.A systems, toxic dressing rooms, non existent riders, imaginary contracts, indifferent sound engineers and the continuing existence of the flyer deal : Rock n’ Roll has nothing to do with music. » Une description sombre de l’univers actuel de l’industrie musicale, agrémentée de quelques anecdotes personnelles dont une annulation de concert à Saint Malo. Comme quoi ça arrive à des biens meilleurs que nous…

 

 

Setlist : I Turn my Face to the Forest Floor – Damage II – Nicole – the Ghost of Saint Paul – In Miniature – Saints – Hourglass – the Prize – Blue Beard – the Foundry – Black Holes in the Sand // Grand Union Canal? – Cities Beneath the Sea

 

 

(1)   à tel point qu’on finit par ne plus trouver les mots pour décrire leurs disques. « le nouveau Woven Hand ? boah, rien d’extra ordinaire, il est superbe, comme d’hab… »

(2)   avec une batterie simplifiée (c’est la tendance) mais cette fois à l’extrême, puisque des toms ne subsistait que le basse. J’ai beaucoup observé le jeu du batteur, c’est en général signe que je m’emmerde un peu…

(3)   Avec le recul, je me rends compte que les prestations de Crane Angels et Gravenhurst furent parfaitement opposées, dans leurs qualités comme leurs défauts respectifs.

(4)  Heureusement d’autres sont moins coincés que moi, en témoigne ce très instructif interview qui répond à pas mal des interrogations que je ne su poser hier soir.

 

un extrait live du dernier album, assez représentatif du concert d'hier:

 

et la fameuse version de "Black Holes in the Sand", déjà sur le net!

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