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Blinking Lights (and other revelations)
8 juin 2022

Nick CAVE & the BAD SEEDS - Lundi 06 Juin 2022 - Nuits de Fourvière - LYON

01

 

Pas grand-chose à se mettre sous la dent dans la programmation des Nuits de Fourvière cette année, mais je n’allais pas manquer le retour de Nick Cave presque 10 ans après le fabuleux concert donné en ce même lieu. Enfin, pas manquer, c’est bien parce que Mélaine a un CE qui me permit d’avoir une réduction sur le prix, car je n’aurais pas payé les indécents 68 euros réclamés pour la soirée mais bref, je retrouvais l’amphithéâtre quelques jours après la représentation du Tartuffe de Molière dans une mise en scène moderne notable pour une bonne soirée en famille malgré une courte mais copieuse averse. Le ciel est une nouvelle fois assez menaçant alors que notre petit groupe se rejoint au point de rendez-vous convenu à la sortie du funiculaire. J’arrive avec Constance et retrouve Fred, puis nous attendons Damien et Alice alors qu’une file immense (du jamais vu) se forme devant l’entrée. Il y aura finalement assez peu d’attente et fort heureusement le public, majoritairement vieux évidemment, se sera jeté sur les gradins, nous laissant une place de choix au milieu de la fosse. Notre petit groupe s’est séparé et c’est avec Fred et Constance que nous nous positionnons devant la scène une pinte à la main, dans l’attente de la tête d’affiche : il n’y a pas de première partie ce soir et franchement c’est pas plus mal, car contrairement aux prévisions optimistes de mes amis une bonne pluie s’est abattue sur Fourvière, les k-ways et autres ponchos sont de sortie alors que je provoque quelques moqueries avec mon sac poubelle certes un peu trop étroit mais, je trouve, astucieusement prévu.

 

05

 

Après de longues minutes de fond sonore d’orgue, Nick Cave et son groupe entrent en scène et pulvérisent immédiatement les (légères) craintes d’un concert lugubre consacré exclusivement aux derniers disques endeuillés de l’australien. Assez curieusement, le début de la setlist est consacrée à l’album Abattoir Blues / The Lyre Of Orpheus que je n’ai pas écouté depuis des lustres et dont je n’identifierais clairement que l’explosif « There She Goes, My Beautiful World ». Le premier classique de la soirée déboule vite, un « From Her to Eternity » fabuleux, porté par la basse métronomique de Martyn Casey - j’adore son jeu ultra répétitif et précis, qui sera aussi remarquable sur « Tupelo » - et les notes dissonantes de glockenspiel de l’imperturbable et classieux Jim Sclavunos, que nous surnommerons « le barman » (puisqu’il utilise aussi cette sorte de maracas appelé… shaker). Le percussionniste échangera à quelques occasion sa place avec un batteur aussi âgé que techniquement impressionnant (un certain Larry Mullins, ayant collaboré entre autres avec Swans et Iggy Pop), notamment dans un jeu de caisse claire propre à renforcer la tension latente des titres interprétés. Toujours en arrière-plan, sur la droite cette fois, la blonde remplaçante du défunt Conway Savage aux claviers, et un trio dont les tenues à paillettes tranchent avec la sobriété classe des membres des Bad Seeds qui viendra assurer les chœurs omniprésents dans l’œuvre du Cave en y ajoutant, la plupart du temps assez agréablement, une touche gospel. Au premier plan, on retrouve le guitariste George Vjestica, discret et efficace, sur la gauche, et l’inimitable Warren Ellis sur la droite, alternant violon, guitares et claviers. Nick Cave cabotinera dans tous les sens comme à son habitude, serrant continuellement les mains qui se tendent vers lui, parcourant la scène de gauche à droite avec force invectives et postillons, levant les bras au ciel et multipliant les attitudes mystiques, dimension fortement accentuée à cette tournée (par rapport au concert précédent) par la présence des choristes, le jeu de lumière et certains titres récents, paroxysme atteint en toute fin de set. Un jeu de scène un peu too much qui pourra en énerver certains, mais qui je trouve participe au côté fascinant du spectacle et est surtout rendu supportable par une bonne dose de second degré. Nick Cave, en grand professionnel, aura joué avec le public, ses incessantes requêtes ou beuglements (« i love you » !!), trouvant des réparties bien senties à tout coup, se servant d’une fan comme porte micro, de Warren Ellis, consacré « quasi français », comme impayable traducteur, ou se payant le luxe de draguer ostensiblement une jeune fille à la barbe (c’est le cas de le dire) de son compagnon sur lequel elle était juchée en modifiant légèrement à son intention les paroles de « Red Right Hand ». 

 

04

 

Après ce premier quart dont l’intensité sera à son apogée sur le toujours impressionnant « Jubilee Street », Nick Cave calme le jeu pour une série de morceaux dépouillés issus des derniers albums, ce qui constituera le temps faible de la soirée. Les extraits de Ghosteen et Skeleton Tree peineront à émouvoir, d’autant que bizarrement les choristes n’y apporteront pas grand-chose. Pas forcément une question d’ambiance, puisque « Carnage », dans le même registre, passera beaucoup mieux : le dernier opus du même nom signé en duo est vraiment bon, et on en aura confirmation avec un deuxième extrait assez marquant, un « White Elephant » judicieusement choisi pour clôturer le set. Le groupe relance la machine avec une belle série de grands classiques, tous interprétés de manière convaincante. On aurait bien vu prolongé ce « Mercy Seat » partant d’une base acoustique pour se tendre jusqu’au point de non-retour, mais nous ne bouderons pas le flamboyant « Higgs Boson Blues », que j’appelais justement intérieurement de mes vœux lors d’une séquence de requêtes désordonnée de la part du public juste avant son introduction à la guitare électrique par Warren Ellis. En vieux morceau moins entendu, « City of Refuge » enfonçait le clou de cette enthousiasmante séquence, donnant lieu à un jeu de scène de la part des choristes venus en procession au premier plan dispenser leur conseil alarmiste au public à coup d’index menaçants. C’est sur un refrain 100% gospel répété ad lib que le groupe quitte une première fois la scène, avant que Nick Cave ne revienne seul s’assoir derrière un grand piano utilisé jusqu’à présent sporadiquement pour un « Into My Arms » très classique. Virage à 180° pour la suite, le groupe réinvestissant bruyamment la scène sur « Vortex », obscure b-side au parfum hard rock 90’s, jusque dans les soli de guitare baryton de Warren Ellis. Très décalé mais très plaisant, ce titre précède un « Ghosteen Speaks » possédé où Nick Cave, tel un pasteur bénissant son assemblée, tenta de provoquer une communion entre scène et amphithéâtre en psalmodiant à l’aide des choristes le mantra « I am beside you, you are beside me », réclamant mains levées et chants comme chez les évangélistes. Un final qui aurait pu tourner à la farce, mais Nick Cave a le charisme et l’histoire personnelle qui font plutôt pencher la balance vers la sincérité et, finalement, l’émotion.

 

02

 

Une émotion qui me submergera sur le bonus de luxe que l’artiste nous accorda en deuxième rappel, un magnifique duo avec l’une des choriste sur « Henry Lee », issu de Murder Ballads, porte d’entrée chère à mon cœur à l’univers du Cave. On espère brièvement une prolongation supplémentaire avant que les lumières se rallument, nous optons alors pour une bière au détriment d’un hypothétique métro, le groupe ne s’étant pas foutu de nous en jouant quasiment 2 heures.  On se retrouve tous les 5 au bar pour partager nos impressions, unanimement positives. Ce n’est pas la moindre qualité de Nick Cave d’avoir su séduire les ayatollahs de sa période rock, les tenants du crooner, les fins connaisseurs comme les amateurs plus occasionnels. J’ai de mon côté beaucoup apprécié la diversité de la setlist et me pose encore la question de quel set, entre celui-ci et celui de 2013, fut le plus marquant. Nous rentrons à pied avec Fred et Constance en discutant tranquillement, et nous séparons après une ultime tentative au Balek Bar, fermé en cette heure tardive. Pas grave, j’aurais l’occasion très prochaine de trinquer avec chacun d’eux pour des concerts qui promettent du lourd et dont vous aurez bientôt des nouvelles en ces pages. 

 

03

 

Setlist : Get Ready for Love - There She Goes, My Beautiful World - From Her to Eternity  - O Children - Jubilee Street - Bright Horses - I Need You - Waiting for You – Carnage – Tupelo - Red Right Hand - The Mercy Seat - The Ship Song - Higgs Boson Blues - City of Refuge - White Elephant // Into My Arms – Vortex - Ghosteen Speaks // Henry Lee

 

 

 

 

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Commentaires
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Bonjour Xavier. Je n'ai vu qu'une fois Nick Cave, en tête d'affiche du festival Beauregard près de Caen début juillet 2013 à l'époque de Push the Sky Away mais c'est un souvenir impérissable! Nick Cave a toujours eu plus d'une corde à son arc, pardon sa guitare (!) et il l'a prouvé ce soir-là. Un homme capable d'évoquer tour à tour Scott Walker, Iggy Pop, Leonard Cohen, d'insuffler une telle force à scénique à ses chansons, de passer une bonne partie du temps au contact des premiers rangs (j'y étais!), de mimer des coups de pied en direction des photographes qui ne restent que le temps des 2-3 premières chansons.... Bref! C'est le genre de souvenirs "live" que l'on aime chérir!
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D
Bonsoir Xavier , <br /> <br /> C’est toujours un plaisir de lire tes comptes-rendus de concerts et une fois de plus je ne te cache pas ma jalousie de vieux bloguer sur le déclin 😉<br /> <br /> Pour ma part j’ai adoré ce concert et Dieu sait que je ne m’y attendais pas . J’ai été impressionné par la présence et surtout la voix de Nick Cave . J’ai fait un paquet de concerts et Nick Cave plane tellement au dessus de la mêlée à ce niveau-là que ça en devient surnaturel. <br /> <br /> Je pèse mes mots . <br /> <br /> J’ai adoré les extraits de Goshteen speaks, surtout « Bright horses » qui m’a ému aux larmes. <br /> <br /> Ça va être compliqué de voir un concert qui supporte au moins un peu la comparaison … <br /> <br /> A très bientôt je l’espère 😉 !
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