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On l’avait expliqué lors de l’épisode 108 consacré à leur premier album My Own Prison, Creed n’a jamais été populaire parmi les amateurs de rock indé de mes connaissances, souvent pour de mauvaises raisons. Mais, comme ils le chantent sur un titre qui aurait fait un joli final, « there is no reason to hide », donc annonçons le sans plus attendre : j’ai adoré la réécoute quasi-intégrale de Weathered, leur troisième album sorti en 2001. Et comment en aurait-il pu être autrement, quand le groupe compile toutes les saveurs de mes chers 90’s, en particulier les grosses guitares façon Smashing Pumpkins du Mellon Collie, mais aussi les power ballades à la manière de Pearl Jam, la virtuosité de Muse ou les ambiances pesantes d’Alice In Chains, le tout saupoudré d’une bonne dose de metal et d’un peu de sucre commercial. Irrésistible, d’autant que les compositions, aux plans assez classiques, sont diablement bien foutues (de toutes manières, quand il y a de beaux arpèges avec un bon refrain explosif au bout, ça me parle…) Le leader Scott Stapp sombrant dans une dépression qui planait dès les débuts de Creed, le groupe splitte après ce Weathered, avant une éphémère reformation en 2009 qui donnera lieu à un album que je n’ai jamais écouté. Depuis, groupe et chanteur suivent des carrières séparées qui n’ont pas eu d’échos en Europe.
Tentant toujours de me familiariser avec la discographie de R.E.M, je parvenais à emprunter leur dernier album en date à l’époque de ces cassettes (2001), Reveal. Malgré ce titre, pas de quoi me provoquer enfin la révélation attendue. Et là vous vous dites : c’est pas possible, il va pas dénigrer R.E.M après avoir tressé des lauriers à Creed ! Malheureusement c’est le cas, cette moitié retenue de Reveal m’ayant bien ennuyé. A forte teneur acoustique, utilisant la plupart du temps une boite à rythme, Reveal est dans la continuité de Up et du départ du batteur historique du groupe. Sur le papier, de quoi plus m’accrocher que la pop mid tempo des 80’s, mais paradoxalement c’est justement le seul titre où R.E.M s’auto parodie que j’ai préféré (un « Imitation of Life » choisi, sans surprise, comme premier single). Bref, un nouvel échec qui ne me découragera pas, puisque le groupe de Michael Stipe reviendra prochainement dans cette rubrique avec, cette fois, un grand classique.
Il était assez logique que je finisse par emprunter à la médiathèque Forever Changes, 3eme album de Love figurant au menu de toutes les anthologies du rock et autres 100 disques indispensables de Rock&Folk. Surtout, entre « Alone Again Or » repris par Calexico (et on le comprend, tant guitare hispanisante et cuivres tonitruants de ce titre semblent préfigurer le groupe de Joey Burns) et le nerveux « A House is not A Motel » repris par Yo La Tengo, Forever Changes semble avoir inspiré un nombre assez impressionnant de groupes, d’où son statut culte. Loin de se résumer à l’étiquette psychédélique qu’on lui a accolée, Love réussit ici la synthèse inédite du folk, du flamenco, du rockabilly, de la pop et du blues. Si j’avais enregistré une grande partie de Forever Changes, ainsi que quelques bonus issus de la réédition 2001, j’ai toujours quelques réserves plus ou moins marquées selon les réécoutes. J’aime beaucoup les guitares, que ce soit les arpèges fous, la folk aux rythmiques particulières ou les solos électriques très rock alternatif, j’aime aussi le chant et le fait que les morceaux soient assez variés. J’ai plus de mal avec la complexité de certaines compostions, qui me perdent en route, et les arrangements classiques un peu pompeux (« Old Man »). D’une manière plus générale, on sent une composition très travaillée, une érudition (un peu comme pour les Beach Boys) qui s’accorde mal à l’enfant du punk et du metal que je suis. Voici sans doute pourquoi Forever Changes, malgré sa qualité indéniable, restera la seule incursion de Love en cette rubrique (j’ai écouté par la suite aussi Da Capo, que de mémoire j’avais beaucoup aimé).