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Blinking Lights (and other revelations)
1 mai 2015

LEONARD COHEN - 09 Juillet 2008 - Nuits de Fourvière - LYON

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Il y a des coups de fil inespérés. Comme celui que nous passa une employée des Nuits de Fourvière, pour nous annoncer que nous disposions de deux places pour le concert de Leonard Cohen, complet quelques heures à peine après la mise en vente des billets, trafiqués dès lors à un prix  astronomique sur ebay - ma femme s’était consciencieusement inscrite sur la liste d’attente, on peut dire qu’elle a eu une inspiration géniale. Oubliées les bonnes résolutions du style « je ne paierai jamais un concert plus de 30 euros » ou « je ne donnerai jamais mon numéro de carte bleue par téléphone »,  nous sautions sur l’occasion de participer à cette tournée historique. Plus tard vinrent les doutes. Sur l’organisation : que va-t-on faire de notre fille, hein ? Sur le bonhomme : ayant lu des comptes rendus de tournées d’icônes du rock, comme Bob Dylan,  je craignais un concert court, froid et distant, en un mot pour le fric, quoi… Sur la musique : j’avais depuis longtemps quatre bons albums, en l’occurrence les deux premiers, ainsi que Various Position et I’m your Man. Ayant eu les places pour le concert, je découvrais les autres avec une crainte grandissante, car il faut bien dire que les albums des années 70 sont assez mauvais, en particulier un Death of a Ladie’s man catastrophique, quant à ceux sortis dernièrement, si Ten New Songs est pas trop mal, Dear Heather est carrément barbant. Donc suivant la setlist, il y avait quand même moyen que je trouve le temps long. Mais il n’en fut rien, et la soirée fut magnifique, bien au-delà de mes espérances.

Après avoir longuement hésité à l’emmener, nous options pour la formule gagnante grand-mère + biberon pour Héloïse. Pas sur que la sécu nous ai laissé rentré avec une poussette, de toute manière. Nous passions les crispantes étapes de contrôle et d’attente propres à ce festival coincé avant de pouvoir nous asseoir dans les gradins. Si jusque là la chance avait été largement de notre coté, nous eûmes le malheur de poser nos fesses juste devant les deux seuls gros beaufs de l’assemblée, capables de discuter pendant chaque titre, voir de regarder les étoiles ou de danser comme un sac à vin alors que la plupart des 3000 autres spectateurs ne s’enlevèrent le balai qu’ils avaient dans le fion que pour balancer des coussins sur la scène dès le premier rappel (shame on Lyon). Bref ce couple de supporters de foot furent le seul point négatif du concert, mais ne réussirent pas à me déconcentrer du fascinant spectacle offert par Leonard Cohen et son groupe. A mille lieues de mes craintes, le canadien fut tout au long du concert dynamique, souriant, affable, respectueux du public et de ses musiciens. Il fit l’effort de parler français, le plus souvent pour traduire le premier couplet de ses chansons, et parfois pour discuter avec beaucoup d’humour avec l’assemblée. Il arrive sur scène, avec une classe incroyable (costard et chapeau), le sourire jusqu’aux oreilles, avec la posture un peu courbée du moine bouddhiste qu’il a été. A chaque solo de ses musiciens qu’il présentera au minimum une dizaine de fois chacun, il retire son chapeau et écoute religieusement dans l’ombre, s’agenouillant même à plusieurs reprises devant le joueur de mandolines et autres luths anciens. Et sa voix grave est une véritable bénédiction, intacte malgré ses 75 ans, remplissant l’espace de manière magique et reléguant mes craintes sur la setlist aux oubliettes. Celle-ci fut de toute manière quasi parfaite, avec seulement le Songs From A Room un peu délaissé à mon goût, uniquement représenté par le grand classique « Bird On the Wire ». Leonard Cohen préféra  représenter la première partie de sa carrière par son premier album, dont chacun des titres  fut acclamé par la foule. Passant quasiment sous silence sa mauvaise période (avec quand même un superbe « Who by the Fire » précédé d’un solo de guitare orientale), le groupe insistait sur mes albums favoris ainsi que sur le beau the Future, en jouant notamment presque l’intégralité de I’m your man. Entre passages émouvants (« Everybody Knows », ou son duo avec une choriste sur « Take this Waltz ») et dynamiques (« Democracy », « First we take Manhattan »), le concert ne souffrit d’aucun temps mort, d’autant plus qu’on sentait le chanteur vraiment habité par ses textes et que les solos restaient la plupart du temps sobres et de bon goût  (A part les inévitables variations saxophoniques et un malheureux déluge d’orgue au milieu d’ « Hallelujah »). Après une première partie de concert idéale et un entracte un peu longuet, c’est un Leonard Cohen très détendu qui revenait au galop sur scène pour un « Tower of Song » prolongé par les choristes. « On est pas pressé », clama il à la foule alors que les trois chanteuses tournaient en boucle sur « da doo dam dam »* à sa demande. Sharon Robinson fut mise à l’honneur sur les deux chansons de Ten New Songs (dont le meilleur titre de sa période actuelle, « In My Secret Life ») tandis que les deux sœurs Webb interprétèrent en fin de spectacle une magnifique version de « If it be your will » en s’accompagnant d’une guitare et d’une lyre (Leonard Cohen avait juste récité le texte auparavant dans un attitude de prière, après avoir insisté sur le luxe d’être ensemble pour un spectacle musical là ou tant de pays sont en guerre). Deux heures trente de concert, ponctuées par « I tried  to Leave You » aux paroles idéales pour ce final (“And here's a man still working for your smile”) ce qui fait rire le public aux éclats, et où Leonard Cohen présentera une dernière fois chacun de ses musiciens après un ultime solo. Puis l’ensemble chantera en chœur un refrain avant de quitter définitivement la scène sous les acclamations du  public, conscient d’avoir eu le privilège d’avoir vu un grand homme de la musique dont l’attitude sur scène impeccable contrastait avec la véritable raison de son retour : le besoin de se refaire un peu d’argent pour sa retraite, après avoir été complètement dépouillé par son ancienne manageuse.

"Il veut mettre toute sa force, son coeur, son énergie mentale et sa dévotion à faire redécouvrir son oeuvre avec ce spectacle. L'exercice de la promotion n'y a pas sa place." disait son fils à propos de cette tournée. Une parfaite description du concert auquel j’ai assisté.

 

Setlist : Dance Me To The End Of Love - The Future - Ain't No Cure For Love - Bird On The Wire - Everybody Knows - In My Secret Life - Who By Fire - Hey, That's No Way To Say Goodbye – Anthem /  Tower Of Song - Suzanne - The Gypsy's Wife - Boogie Street - Hallelujah - Democracy - I'm Your Man - Take This Waltz /  So Long, Marianne - First We Take Manhattan - Sisters Of Mercy - If It Be Your Will - Closing Time - I Tried To Leave You

*  « J’ai la réponse à toute les questions philosophiques que je me posait sur la vie, je viens de l’avoir. Et comme je ne suis pas le genre de personne qui garde son savoir pour lui, je vais vous la donner. Cette réponse c’est …. C’est …. Da doo dam dam !! »

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